Lettre ouverte des mouvements sociaux aux membres du Conseil de Sécurité
Lettre ouverte de 13 organisations et institutions adressée au Conseil de Sécurité
jeudi 16 février 2012
Document transmis à AlterPresse le 15 février 2012
Non à la tutelle déguisée en Haïti ! Non à la recolonisation sournoise de notre pays ! Non à la destruction de nos Institutions ! Oui à l’Auto-détermination du peuple haïtien !
Nous organisations du Mouvement Social Haïtien concernées par le présent et l’avenir du pays et signataires de cette lettre ouverte, tenons à vous renouveler notre refus le plus entier à l’expression la plus honteuse et hideuse de l’occupation en Haïti, nous voulons citer la MINUSTAH.
8 ans d’occupation militaire porteuse de kidnappings, de viols collectifs de mineurs-es, de pendaison, de prostitution de familles entières à travers des marchandages de services sexuels contre nourriture, de domestication du système judiciaire dans les villes intérieures et régions rurales du pays, de répression contre les quartiers populaires et les protestations pacifiques. Pire encore, des soldats de la MINUSTAH ont introduit le Choléra sur le territoire haïtien provoquant la mort de plus de 7000 personnes et laissant des enfants orphelins désemparés à travers le pays et une nouvelle source de stigmatisation. NON ! NOUS EXIGEONS JUSTICE ET RÉPARATIONS POUR LES VICTIMES DES INNOMBRABLES CRIMES COMMIS PAR VOS SOLDATS ET POLICIERS ! NOUS VOULONS QUE VOS TROUPES PARTENT LE PLUS VITE QUE POSSIBLE !
Messieurs les membres du Conseil de Sécurité, vous savez mieux que quiconque que cette Mission des Nations-Unies pour la Stabilisation d’Haïti est un échec. Aucun des objectifs postulés dans vos nombreuses résolutions n’a été atteint. Après 8 ans d’occupation militaire et 20 ans de présence directe des Missions des Nations Unies, le climat de sécurité et de stabilité n’est toujours pas à l’horizon. Les dernières joutes électorales de 2009, 2010 et 2011 constituent une honte et un spectaculaire renoncement à toutes les valeurs démocratiques. Notre territoire continue à être un point important de transit des flux de drogue vers le marché nord-américain. La frontière entre Haïti et la République dominicaine continue d’être la proie des contrebandiers et des bandits. Les droits de la population continuent à être piétinés sans ménagement et vos soldats figurent parmi les auteurs de violations systématiques de toute sorte contre les segments les plus vulnérables de notre population tout en jouissant d’une insolente impunité.
8 longues années de déstabilisation qui ont coûté plus de 6 milliards de dollars américains. De précieuses ressources financières qui, investies pour la construction des capacités de nos institutions et pour répondre au déficit criant des politiques sociales de l’État, auraient pu avoir un impact positif. Votre présence est un obstacle à l’arrivée des Investissements directs à l’étranger (IDE) tellement souhaitée par la propagande officielle. Tous les observateurs honnêtes ont souligné l’inadéquation de votre Mission relevant du Chapitre 7 de la Charte des Nations Unies et la crise vécue par notre pays.
La présence de votre Mission n’a en rien stabilisé les institutions haïtiennes. Bien au contraire. Elle a stimulé une augmentation significative du coût de la vie en particulier dans les secteurs du logement et de l’alimentation et modifié le marché du travail encourageant une massive migration des professionnels haïtiens vers les ONGs et les institutions internationales travaillant dans notre pays. Votre présence directe dans la répression contre les mouvements pacifiques réclamant par exemple l’augmentation du salaire minimum en 2009 ne laisse planer aucun doute sur l’orientation de la MINUSTAH. Votre implication dans l’arrestation du député Arnel Bélizaire illustre bien votre mépris pour les Lois et les institutions haïtiennes. Vous vous êtes impliqués directement dans l’organisation des élections réalisées contre les prescrits de la Constitution de 1987 qui prévoit un CONSEIL ÉLECTORAL PERMANENT. A chaque fois, votre machine manipulatrice incluant la MINUSTAH est toujours là pour orienter, financer, supporter, accompagner et téléguider un Conseil Electoral Provisoire inconstitutionnel et vous avez toujours pris le soin de conserver le contrôle des leviers stratégiques de ces opérations frauduleuses.
Au fait, vous avez téléguidé cette MISSION en Haïti non pour institutionnaliser mais pour desinstitutionnaliser le pays. Votre objectif est clair : Il s’agit de refaire l’expérience coloniale sur cette terre haïtienne d’où est parti le premier coup de massue contre les empires esclavagistes. Vous voulez à tout prix maintenir Haïti dans cette position si confortable pour vous, celle d’un pays cobaye. Sous la rhétorique mensongère d’une soi-disant coopération Sud-Sud vous vous inscrivez clairement dans les stratégies régionales de domination impérialiste contre les Peuples de notre continent.
Dans votre implacable logique, vous aviez, dans une Résolution du Conseil de Sécurité adoptée en octobre 2010, déclaré qu’HAITI reste une menace pour la Paix dans la région ; alors que le pays pleurait encore ses 300 000 hommes, femmes et enfants engloutis par le séisme terrifiant du 12 Janvier ; alors que plus d’un million et demi de personnes souffraient de toutes sortes de privations dans d’immenses camps de déplacés.
C’est l’occasion de rappeler que la Misère sur notre Planète Terre est une médaille à deux faces : Une MISERE MATERIELLE, celle que subissent les pays appauvris par les appétits insatiables des puissances impérialistes et leurs institutions néocoloniales qui organisent et maintiennent la domination et le pillage de nos ressources (FMI, BM, BID, OMC, OTAN, …) ; mais aussi une MISERE MORALE, celle des puissants appauvris dans leur HUMANITE, obnubilés par le processus de soumission aux dictats de la marchandisation et du Capital financier mondialisé et allant de plus en plus à contresens des idéaux qui ont présidé à la création de l’Organisation des Nations-Unies.
Nous, citoyens, citoyennes signataires de cette lettre, continuons de réclamer le droit à l’auto-détermination du peuple haïtien et disons : Non aux Missions Néocoloniales ! Non à la MINUSTAH déstabilisatrice et violatrice de droits humains ! Oui à l’autodétermination du peuple haïtien !
Organisations signataires : PAPDA, GARR, SANT PON AYITI, POHDH, SOFA, FRAKKA, KRD, CHANDEL, ICKL, FONDASYON ZANMI TIMOUN, UNNOH, MODEP.
Pour authentification : Camille Chalmers Directeur exécutif PAPDA